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Né en 1925, Jean d’Ormesson est un personnage qui fascine autant qu’il interpelle. Elu en 1973 au fauteuil 12 à l’Académie française, ce normalien et agrégé de philosophie a mené des carrières de philosophe, écrivain, poète, romancier, artiste et animateur, rien que ça ! Décédé à l’âge de 92 ans dans la nuit du 4 au 5 décembre 2017, il aura légué plusieurs livres marquants, dont La Douane de mer, Histoire du Juif errant, C’était bien, Qu’ai-je donc fait… Subtil, Jean d’Ormesson l’est certainement. Il dit militer pour « la hausse du prix des timbres ». Lui, le bourgeois auquel on a appris que « toute lettre mérite réponse », ne veut plus qu’on lui envoie de lettres car il n’en peut plus. Non sans humour, il demande à ce qu’on l’admire en silence. Du d’Ormesson tout craché. Retour sur la vie et le parcours de l’académicien.

Qui est le comte d’Ormesson ?

De son nom complet Jean Lefèvre d’Ormesson, Jean d’O comme les médias aiment à l’appeler était comte d’Ormesson, issu de l’une des rares familles restantes de la noblesse française : Lefèvre d’Ormesson. Du côté de sa mère, Jean d’Ormesson est descendant de la lignée Lepeletier de Saint-Fargeau. Ses origines, on les devine non seulement à son nom de famille, mais aussi à l’enseignement qu’on lui dispense. Jean d’Ormesson était, entre autres, élève à l’Ecole normale supérieure.

Auteur prolifique, Jean d’O écrira plus de 40 livres au cours de sa vie, tous genres confondus : fresques historiques, essais philosophiques… C’est ainsi qu’il sera, en 1973, élu au fauteuil 12 à l’Académie française. Une année plus tard, il prend la direction du Figaro, un poste qu’il occupe jusqu’en 1977. Pendant de longues années, Jean d’Ormesson a fait figure de représentant dans les médias de l’Académie française, prenant part à de nombreuses émissions télé où il ne manquait pas de faire montre de toute son éloquence, non sans humilité. C’est ce qui lui vaudra l’admiration de nombreuses personnalités, de Philippe Sauvannet jusqu’à Julien Doré.

Jean d’Ormesson : jeunesse et formation

Son enfance, Jean d’Ormesson la passera au château de Saint-Fargeau, propriété de la famille de sa mère dans l’Yonne. Ambassadeur à la retraire, son père prend en charge la Croix-Rouge française. La famille d’Ormesson suit donc le père, au gré des missions qui lui sont confiées, d’abord en Bavière de 1925 à 1933, puis en Roumanie et au Brésil. Jusqu’à l’âge de 14 ans, Jean d’Ormesson sera élevé par sa maman, mais aussi par des gouvernantes. Sa scolarité, il la fera par correspondance du Cours Hattemer.

Jean d’Ormesson fera un passage en Auvergne, toujours en raison du travail de son père, mais il n’y restera que quelques mois. Il quittera la région pour prendre la direction de Nice, non sans avoir vécu un hiver des plus glaciaux, et pris l’habitude de prendre le tramway Royat – Clermont-Ferrand quotidiennement. On est en 1941. A Nice, Jean d’Ormesson prendra place au lycée Masséna, entre 1941 et 1942. Après une première tentative ratée, il y obtient son bac en 1943, et entre ensuite en hypokhâgne au lycée Henri IV. A l’âge de 19 ans, Jean d’Ormesson est accepté à l’Ecole normale supérieure.

A l’Ecole normale supérieure, Jean d’Ormesson décroche une licence ès lettres et en histoire. Il s’essaye ensuite à la philosophie en tentant l’agrégation, malgré le fait que son professeur Louis Althusser ait essayé de l’en dissuader. Il aura raison de tenter sa chance, obtenant son agrégation de philosophie en 1949.

Le début de carrière

Sorti de l’Ecole normale supérieure, Jean d’Ormesson fait son service militaire au régiment parachutiste. Peu de temps après, il s’essaye à l’enseignement en donnant quelques cours au lycée Jacques-Decour (grec classique, philosophie). C’est à ce moment qu’il se lance dans le journalisme à Paris Match, et collabore également avec Nice-Matin, Ouest-France et Progrès de Lyon. Sur recommandation d’un ami de son père, Jean d’Ormesson est nommé secrétaire général du Conseil international de la philosophie et des sciences humaines à l’UNESCO. Plusieurs années plus tard, il deviendra président de ce même conseil de 1992 à 1996. Entre 1952 et 1971, Jean d’Ormesson est tour à tour rédacteur en chef adjoint, membre du comité de rédaction et rédacteur en chef de la revue Diogène. Il prend par ailleurs part à plusieurs cabinets ministériels en qualité de conseiller.

Jean d’Ormesson, romancier et académicien

Jean d’Ormesson est un homme aux multiples talents. Son premier roman, il le publiera en 1956. Le succès commercial de L’amour est un plaisir ne sera pas au rendez-vous, seuls 2 000 exemplaires ayant trouvé preneur. Il faudra attendre 1971 pour le premier succès en librairie d’un roman signé Jean d’Ormesson, La Gloire de L’Empire, écoulé à plus de 100 000 exemplaires. Dans la foulée, le romancier reçoit le grand prix du roman de l’Académie française. Auteur inclassable, Jean d’Ormesson publie plusieurs romans qui sortent des carcans du genre, mêlant humour, digressions, anecdotes personnelles et érudition. Il sera par ailleurs l’un des seuls à être édité de son vivant au sein de la collection de la bibliothèque de la Pléiade des éditions Gallimard.

Le 8 octobre 1973, Jean d’Ormesson est élu au fauteuil 12 de l’Académie française, succédant ainsi à Jules Romains, décédé une année plus tôt. Il est utile ici de noter que l’oncle de Jean, Wladimir d’Ormesson, occupait le fauteuil 13 de l’Académie française, jusqu’à son décès le 15 septembre 1973. A son acceptation à l’Académie, Jean d’O militera pour l’entrée sous la coupole de Marguerite Yourcenar. Ce sera fait, faisant de cette dernière la première femme de l’histoire à être admise à l’Académie française. On est en 1980. Il récidive en 2003 en militant pour la candidature de Valéry Giscard d’Estaing, pour laquelle il fera un discours de présentation. A son entrée sous la coupole, Jean d’Ormesson était le benjamin de l’Académie française. Mais à son décès, il fut le doyen d’élection et le vice-doyen d’âge. En tout état de cause, l’homme y aura laissé sa marque…